Bridgestone : "En France, il y a un problème structurel de l'industrie"
Le fabricant japonais de pneus Bridgestone a annoncé la fermeture de son usine de Béthune. Le groupe invoque notamment une surcapacité de production en Europe. Une décision vivement critiquée par le gouvernement. 863 emplois sont en jeu. Evidemment, pour les gens concernés, c'est un choc et une souffrance, mais cela révèle aussi qu’il existe en France un problème structurel de l’industrie.
Evidemment, pour les gens concernés, c'est un choc et une souffrance, surtout dans une ville de 25.000 habitants. Il y a évidemment un problème pour le bassin d'emploi, et il conviendra de trouver dans le dialogue social, les solutions de reclassements, de reconversions les plus favorables aux salariés. Mais à court terme, la solution n'est pas d'interdire cette fermeture puisque, manifestement, l'usine ne peut pas continuer.
En France, il y a un problème structurel de l'industrie du pneumatique, et de l'industrie en général. D’autres industriels sont dans une situation comparable. Le groupe Continental a annoncé la fermeture de son usine de pneus d’Aix-la-Chapelle en Allemagne. Michelin avait fermé l’année dernière son site de La Roche-sur-Yon.
Ce contexte industriel difficile dans laquelle se trouve tout le marché du pneumatique pour véhicules de tourisme depuis plus d’une dizaine d’années, sans même tenir compte de l’impact de la pandémie, affecte les résultats et la compétitivité des entreprises comme Bridgestone en Europe. La concurrence de marques asiatiques à bas-coûts entraîne une pression sur les prix et une surcapacité de production sur le marché.
En une décennie, les effectifs de l’usine de Béthune ont chuté de 40 %, au même rythme que ses volumes de production (passés de 8,5 millions d'unités à 5,1 millions) dans un marché stable. Plus globalement, le marché automobile européen a chuté de près de 40 % au premier semestre et devrait rester en baisse de 25 % sur l'année 2020.
Le gouvernement en a pris conscience puisque le plan de relance est axé sur de la réindustrialisation. Malheureusement, pour Bridgestone, il arrive trop tard.
Mais rappelons tout de même qu’en mai dernier, un projet d’accord de performance collective présenté par la direction de Bridgestone avait été rejeté par les salariés.
L’accord, qui proposait de « travailler plus pour gagner plus » en faisant passer les salariés de 32,04 heures à 34,7 heures par semaine, mais avec une augmentation de salaire dès la première heure de plus, visait à augmenter sa capacité de production. Il aurait en effet permis d’améliorer la compétitivité de l’usine, jugée trop cher par rapport aux autres sites de production du groupe.
Avec un accord de performance collective, la question n’est pas de revenir sur les acquis sociaux. La question est de sauver les emplois en examinant justement toutes les alternatives pour éviter les PSE.
Mais si les plans sociaux font la Une de l’actualité, n’oublions pas que le plus grand risque d’explosion du chômage vient davantage des non-embauches, notamment en CDD et intérim, que des licenciements. Les mesures du plan de relance doivent donc pouvoir se déployer très vite dans les entreprises pour éviter cette spirale.
Une réponse européenne est la seule réponse possible après ces fermetures d'usines qui sont en compétition avec des producteurs extra-européens. Ce marché est sinistré. Tous les industriels européens ferment des usines car il y a une concurrence chinoise à bas coût qui a pris le marché. On essaye d'avoir, en Europe, des normes sociales, sanitaires, environnementales, qui soient les meilleures du monde, mais cela a un coût. Il faut être à armes égales avec des producteurs à l'extérieur des frontières et qui n'ont pas les mêmes contraintes.